Éclos
Et là
D’un coup
Compagnon des rosées
Au firmament sans clé
Bulle d’être
Advenue à mission de reflets
Vouée au bleu
Au rapt
Des beautés primordiales
A peine m’étirant
Déjà
Je quittai l’âge d’or qui n’avait pas eu lieu
Sinon par ces clins-d’œil que fait la Terre
Aux vignes
Et j’écoutais
L’oreille divorcée
L’écho sombre des siècles passer dans les feuillages
Les chansons de papa
Furent mon premier viatique
Au maquis résolu
Fraternel
Où dès lors s’armerait le Poème
* * * *
Jaillie
Qui sait pourquoi
De la houle de l’être
La vie
L’éclat soudain
A reçu des humains peu d’égards
Et d’échos
Au bleu si grand ouvert
Fut préféré l’onirique des dieux
Aux couleurs des saisons
Le fer et l’usine
L’infini
Restera sans patrie
Toi
Pour aimer
Regarde bien la mort
Ne choisis aucune arme
Qui ne soit affûtée des mains vraies
Du soleil
* * * *
Spectatrice éblouie
Toujours
Et à jamais
De la Terre et du ciel
Des hectares impensés de l’offrande
Toujours
Reconnaissante
Salut à toi ma vie
Ma vie
Quoique trop affaiblie
Des pandémies du rien
Du ci-et-là venteux où vont vite les ans
Mais toujours éblouie
Toujours
Et à jamais
Salut à toi ma vie
N’aie rancune des hommes
Et des profanes mécaniques
Qui disent de la Terre
Qu’elle est mathématique
Et matière
Et profit
Quand elle est l’inouï
L’insondable
Présence infatigable appelant son Poème
Salut à toi ma vie
Qui ne cherchait qu’à être
En poète
En enfant
Témoin nouveau des jours
Simple témoin des jours
* * * *
Poème
Tu reviens
Des face-nord du vivre
Tu tenais
Dans la foudre
Du jour à nu
Tes ivresses en nous
Furent aussi
Les moments de la Terre
* * * *
Le verbe
Glisserait aussi
Au verglas des beautés sans contraire
* * * *
Rescapé
Des mandibules
Du nombre
Par chance
Marié au vent
Prêt à l’insolation
Des adrets
A l’ubac des retours
Ne cherchant
Qu’à humer aux antennes du verbe
La prairie fugitive du ciel
* * * *
La Terre
Etait sans voix
Dans l’abattoir des siècles
Vivre
Dans le miracle
Aura eu peu de mots
* * * *
Des yeux
Au ventre passent
Les verticales de la beauté
Foudres bleues au-dedans
Les hommes vont et viennent à l’horizon-chimère
Bourdonnent en pure perte
Au vent
Les cendres du soleil
* * * *
L’homme
Était beau
L’homme
Passant écarquillé
Dans l’univers aveugle
* * * *
Poème
Défends-nous
Des prisons tant aimées
De l’histoire
Ancestrales prisons
Où même le rebelle a toujours fait son lit
Ouvre la beauté nue
Qu’on n’a su qu’entrevoir
Avant de l’endiguer du haut mur des croyances
Comme des marées noires du dieu-chiffre-d’affaire
Ouvre la beauté nue
Beauté d’être
Et d’aller
Beauté qui rejaillit éblouit frappe et meurt
En serrements de gorges
En clins-d’œil répétés où s’enrage le Tout
En spasmes qui appellent à tout revivre encore
Beauté d’être
Et d’aller
Beauté nue de la Terre qui reste encore à dire
Poème
Défends-nous
Du nœud de vipère des routes
Qui ne mènent qu’aux routes
Désarrimant nos pas des pas de la Grande Ourse
Défends-nous
Du couteau dans le dos des fleurs bleues
Du songe à courte-vue du bitume aux fenêtres
Défends-nous
Des haleines de cantine
De l’asphyxie des ruches
Du sacre revanchard du midi-à-sa-porte
Fais-nous Fou de Bassan amoureux fous des houles
Isards dans le qui-vive aux éboulis du bout du monde
Poème
Défends-nous
Des grégaires des crédules en cohortes
Qui massacrent les jours
Empoisonnent les sources
Insultent le vivant
Bâillonnent le soleil
Couvrent les horizons de bêlements sinistres
Garde-nous tes enfants
Que rien n’a pu dompter
Oisifs
Ascensionnels
Non voulus des Eglises
Comme des Industries
Faisant le mur encore au dortoir planétaire
Poème
Ne sois pas ce qu’on dit
Mais ce que dit l’éclair à notre longue Nuit
Sois l’inouï qui fait pleurer
Le jamais-vu nubile en sa robe-univers
Et n’aie crainte
Après toi
De ces vomissements
De trop de tasses bues où l’on n’avait plus pied
N’aie crainte
D’engendrer la bouche abandonnique
La balle au cœur
Qui part
Des faméliques alphabets
* * * *
Roulé
Plus de cent fois
Jusqu’au sable
L’ossature malmenée
Dans le fracas des vagues
Syllabes originelles
Dont le soleil était le point
Je revenais à l’air
Etourdi
Essoufflé
Vidé de toute idée
L’âme comme un cristal
Et là comme
Jamais
La Vie m’est apparue
La vie
La Terre entière
Comme une rosée folle
Sur la fleur infinie de l’espace et du temps
Et j’ai pleuré de Joie
* * * *
Neige haute
Nous passions à la hanche des arbres
Là-bas les crètes
Les épaules du monde
Dont j’étais un moment la fenêtre en éclats
* * * *
Poème te voici
A l’âge du cancer nucléaire
De la Terre
Le jour qui vient
Arrache-le à la fosse commune
Rends-lui ses cris de nouveau-né
Que sont rivières et libellules
* * * *
Comme feuilles d’automnes
Orphelines des sèves
Qui tombent et se soulèvent
Sur les chemins d’automne
Ainsi nos vies
Dans la voltige
Entre naissance et mort
Ces deux montagnes infranchissables
Nos vies
Dans l’amplitude
Des pas pusillanimes aux soleils acrobates
Qui s’enveloppant de voiles
Qui s’entourant de murs
Qui le regard enfant lèvres à la proue
* * * *
Ah non
Ce n’est pas l’orchestre affolé
Des hommes
Criant leur courte vie
Sous le grand firmament
Ah non
Ce n’est plus l’être échevelé
Des nuits
L’accolade enivrée
Au trottoir des visions
Non
C’est le huis-clos
L’amusie domestique en l’atone huis-clos
Et l’œil en solitaire escalade le jour